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Qui a dit « Je suis un cumulard » ? Jean-Toussaint Mattei, 57 ans. Secrétaire départemental et secrétaire régional adjoint de la CFDT. Président du Fongecif, de l'Urssaf,
Ses camarades, eux, l'appellent Poutine. "C'est sympathique" commente, un brin amusé, celui qui est réputé « très dur » dans la gestion du syndicat. Très proche de Laurent Berger, le patron de la confédération (que Les Échos ont récemment compté au rang des « cent qui vont compter »), Mattei peut être un homme de dialogue. « Il discute » dit-on à l'interne. Cependant, dans les négociations, même à l'interne, il peut en effet se montrer « très dur ». Parce qu'il ne transigera jamais avec la philosophie du syndicat. Ce qui fait dire à plus d'un : « Mattei ? On l'aime ou on ne l'aime pas. »
Ce qu'il aime, Mattei, c'est se battre pour les petits. À titre d'exemple, on citera le « conflit du Monoprix », en 2008, au terme duquel les salariés (dont plus de la moitié avait un salaire de 1 200 € à 1400 € après 30 ou 40 années de boîte) obtiendront une augmentation de leur salaire et une prime de 50 €. « La victoire contre un géant comme Les Galeries Lafayette... Que c'était beau ! » commente-t-il aujourd'hui avec la fierté du devoir accompli. Jean-Toussaint aime aussi à rappeler le « conflit de la mairie d'Ajaccio » de 2010. « Les cantonniers, ceux que l'on voit avec un carton et un balai très tôt le matin, demandaient qu'ils soient respectés par leur hiérarchie. C'est-à-dire qu'ils puissent bénéficier à tour de rôle d'un week-end pour pouvoir le passer en famille. Nous avons réussi en partie, avec la mise en place d'une commission. »
Ses premiers pas dans le syndicalisme remontent à la fin des années soixante-dix. Il les fait dans le sillage de Sanvitus Predali, fondateur avec Pierre Cervetti de la CFDT de Corse-du-Sud. « Beaucoup étaient issus du fameux Psu, ce qui explique, je pense, et c'est ce qui m'a séduit alors, la liberté d'expression du syndicat à l'époque. » Il sourit : « Ca continue. »
Jean-Toussaint Mattei est de gauche. « Trotskyste à l'époque. » Un marquage qui « n'a aucune incidence sur l'action syndicale » assure-t-il. De fait, lui et ses camarades de la CFDT (à ce jour, ils sont environ 2 500 adhérents en carte) s'interdisent tout mandat politique.
Tous, ou presque, travaillent. « Les seuls permanents que l'on a, c'est à la Poste. » La CFDT est d'ailleurs la seule union régionale dans ce cas. « C'est un choix, après tu te coupes des réalités. » Ce qui n'empêche pas une vraie et entière disponibilité. Et là, Jean-Toussaint Mattei ne cache pas sa satisfaction : « On commence à 18 heures et on finit à pas d'heure... On doit être à la disposition des salariés, il ne faut pas que ce soit l'inverse. » Du reste, la CFDT de Corse-du-Sud a été citée en exemple à Paris. « La confédération incite désormais les autres régions à opérer sur ce mode de fonctionnement. »
C'est la montée de la précarité en Corse qui l'inquiète. Et la pauvreté. « On devient des assistants sociaux. Nos adhérents ont même des difficultés à payer leur cotisation. » Alors, il se bat sur plusieurs fronts. Les salaires (du secteur public comme du secteur privé), la situation des saisonniers ou des jeunes en formation, le logement, la santé (pour l'accroissement du personnel soignant dans les hôpitaux publics, contre la fusion des deux hôpitaux public et psychiatrique qui « diminuerait forcément les effectifs et provoquerait à terme la disparition du secteur psychiatrique »).
Mais c'est en faveur des salariés des PME et des TPE que la Cfdt s'apprête à mener une « grosse » action. Jean-Toussaint Mattei : « Ils ont des droits, il faut qu'on les informe. Le droit à la formation, par exemple. On va aller à leur rencontre, on ne va pas attendre qu'ils viennent vers nous. Avec ce message simple : ce n'est pas parce que vous êtes dans une petite entreprise que vous avez des petits droits. »
Sur son iPhone, en fond d'écran, la langue des Stones. Lorsqu'il sonne, c'est tantôt « Brown Sugar » tantôt « Miss You ». Celui qui est aujourd'hui responsable du service administratif de l'Office des transports à la Ctc est resté un inconditionnel des Stones (il était au premier rang, lorsque les Rolling Stones se sont produits à Paris). Il est aussi adepte de la marche en montagne, « 9 à 10 heures de marche, avec les copains, le week-end... Arrivés au sommet, un casse-croûte, le silence, la beauté du paysage, l'amitié. On est heureux ».
Heureux, il ne l'est pas toujours. « Parfois je ne sais pas comment être utile, ça me mine. Je me trouve désarmé. J'en parle avec le docteur Pernin (François Pernin, chef de service urologie à l'hôpital de la Miséricorde à Ajaccio, ndlr). On a les outils pour mener les actions syndicales mais pour le reste... L'impuissance me déstabilise ».
En attendant, lorsqu'il « rentre » en négociation, il peut être très dur. « Je représente la confédération, je ne transige pas. » On retrouve Poutine.
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